Fête phare, attendue par près de 101 405 000 de fidèles, le Noël orthodoxe russe constitue l’une des célébration majeure du pays. Symbole de paix, d’amour et de retrouvailles, Noël en Russie est fêté le 6 et 7 janvier, conformément au calendrier Julien.
[Lire plus…]Noël en Lituanie – A la différence des autres pays baltes, la Lituanie est un pays majoritairement catholique avec plus de 70% de lituaniens qui se disent catholiques. Noël « Kalėdos » en lituanien a donc une place particulièrement importante dans la culture du pays.
« Linksmų Šventų Kalėdų! »
La Lituanie est considérée comme le pays d’Europe dans lequel la religion chrétienne est arrivée le plus tardivement. Et pourtant, aujourd’hui, la religion – qui a survécu à l’ère soviétique – est la plus importante du pays. En 2014, 77,3% des lituaniens se considèrent de confession « catholique romaine ».
Pour cette raison, la fête de Noël en Lituanie a une importance semblable à celle qu’elle tient dans la tradition française. Historiquement célébrée, Noël fait aujourd’hui partie des traditions culturelles lituaniennes, entre croyances religieuses et coutume. Les 25 et 26 décembre sont d’ailleurs des jours fériés.
Nombreuses sont les légendes autour de la célébration de Noël en Lituanie. On racontait autrefois que des esprits rôdaient pendant la nuit de Noël, et qu’il ne fallait donc pas s’éloigner du domicile. La maison était aussi nettoyée de fond en comble pour protéger la famille de mauvais esprits. Dans les campagnes, le soir de Noël était l’occasion de prédire l’avenir des membres de la famille. Aujourd’hui, ces histoires sont bien des légendes, pourtant la fête de Noël respecte toujours traditionnellement certaines coutumes.
Kūčios, le réveillon de Noël en Lituanie

Le repas du réveillon de Noël lituanien s’appelle Kūčios. Pas de viande au menu, Kūčios est composé de douze plats, autant de plats que de mois dans l’année, ou que d’apôtres. Parmi ces plats essentiellement composés de céréales et légumes, on retrouve les traditionnels kūčiukai (qui sont aussi parfois appelés šližikai). Il s’agit de biscuits secs au pavot, accompagnés de lait de graines de pavot, ou encore de plats à base de hareng ou de champignons.
Si la plus grande majorité des familles lituaniennes ne mangent pas de viande pour le réveillon de Noël, certains vont même jusqu’à ne jamais consommer, ce soir-là, ni oeuf ni lait. Les plats à base de viande ou les autres plats traditionnels lituaniens (les cepelinai ou les kibinai par exemple) sont réservés pour le repas du jour de Noël en Lituanie ou le lendemain de Noël, les 25 et 26 décembre.
Comme dans la majorité des traditions de Noël en Europe, le Père Noël fait sa tournée des maisons pour apporter des cadeaux pendant la nuit de Noël. Kalėdų senelis (littéralement : le grand-père de Noël) distribue généralement ses cadeaux avant la traditionnelle messe de minuit, le 24 décembre au soir.
Kalėdos sostinėje : « Noël dans la capitale »
A l’arrivée de l’hiver, et en préparation des célébrations de fin d’année, Vilnius se remplit de symboles de Noël et de fête. Chaque année, un impressionnant sapin est installé sur le square de la cathédrale, Katedros aikštė, en plein coeur de la capitale, autour duquel est installé un important marché de Noël : Kalėdos sostinėje, qui signifie « Noël dans la capitale ».
Chaque année, l’immense sapin (de plus de 25 mètres de haut!) et le marché de Noël en Lituanie attirent des milliers de lituaniens et de touristes qui viennent aussi profiter des différentes animations. En ce moment même et jusqu’au 11 janvier, des animations sur le thème des fêtes de fin d’année sont organisées en lituanien, anglais et russe dans la ville de Vilnius.
Noël est aussi l’occasion pour les autres grandes villes de Lituanie d’organiser des festivités. Ainsi, en 2011, le sapin de Noël installé dans la ville de Kaunas (deuxième plus grande ville du pays) a battu le record du monde de plus grand sapin de Noël fait de bouteilles en plastiques. Chaque année, la ville impressionne avec ses sapins souvent élus plus beaux sapins de Noël de Lituanie.
Et la tradition des sapins extraordinaires continue cette année avec un imposant sapin représentant un carrousel. L’inauguration du marché de Noël de Kaunas a d’ailleurs été célébrée avec un spectacle de la Compagnie des Quidams, une compagnie de théâtre de rue française.
Photo de couverture par Pavel Pavel
Le saviez-vous ? Pendant presque 25 ans, Noël en Albanie fut totalement interdit et rayé du calendrier. Retour sur une tradition teintée d’histoire au pays des aigles.
[Lire plus…]La grande fête de l’Union – Ce 1er décembre, comme chaque année, la Roumanie célèbre en grande pompe sa fête nationale. Depuis dix jours, les rues sont pavoisées de drapeaux bleu-jaune-rouge et des centaines d’affiches souhaitent « la multi ani » (un joyeux anniversaire) à la patrie de Ionescu et de Dracula. Mais que fêtent exactement les roumains à grands coups de discours officiels et de țuică (eau de vie traditionnelle roumaine) ?
[Lire plus…]Partons aujourd’hui à la découverte du Corfu Trail, sur l’île grecque de Corfou en Grèce !
Le Corfu trail, long de 220 kms, vous fait traverser le Corfou authentique, le Corfou des villages traditionnels, le Corfou des paysages d’une beauté à couper le souffle, le Corfou des marais où se reposent les migrateurs lors de leurs longs voyages, le Corfou des orchidées qui fleurissent au printemps, le Corfou des montagnes, le Corfou des oliveraies qui s’étirent à l’infini, le Corfou des monastères et des forteresses, le Corfou millénaire en un mot, puisqu’en empruntant le Corfu trail, vous mettez vos pas dans ceux de générations et générations de Corfiotes qui ont sillonné l’île sur ces mêmes sentiers depuis la nuit des temps.


Le Corfu trail part d’Asprokavos, à l’extrême sud de Corfou, et se termine à Agios Spiridon, à l’extrême Nord de l’île. Il est en quelque sorte un axe majeur à partir duquel partent de nombreux chemins de randonnées que les différents districts ou associations locales ont cartographiés et balisés. De nombreux efforts tendent actuellement en ce sens, dans une optique de développement du tourisme vert. Et du vert à Corfou, vous n’en manquerez pas !
Corfou, la plus septentrionale des îles Ioniennes, est un peu notre Bretagne. Si elle est surnommée « the Green Island » par nos amis britanniques, c’est qu’il y pleut, et beaucoup ! Et tant mieux ! Au diable les îles pelées et battues par les vents, à la végétation si maigre qu’elle fait pleurer même les chèvres. Ici, le Corfu trail vous emmènera à la découverte d’une faune variée et d’une flore luxuriante. Et puis forcément, 4 millions d’oliviers, ça ne passe pas inaperçu !

Mais le trail vous emmènera aussi à la découverte de villages pittoresques à l’architecture vénitienne, parfois accrochés à flanc de montagne – il fallait bien se protéger des incursions des pirates -, et vous vous arrêterez au Kafeneio de la place, et vous tomberez sous le charme des lieux et découvrirez la gentillesse des habitants qui partageront sans doute avec vous un verre d’Ouzo ou de Tsipouro… ou deux.
Le trail vous fera découvrir une grande diversité de paysages pour une si petite île, des plages de sable qui n’en finissent pas au Sud, des petites criques aux eaux turquoise à l’Ouest, des paysages grandioses lorsque vous parcourrez les versants escarpés du Pantokrator, la plus haute montagne de l’île ou bien encore les pistes d’Agii Deka, son deuxième point culminant.
Voilà, maintenant, vous avez envie de partir pour parcourir ce chemin idyllique. Un des rares de cette longueur en Grèce, il faut le noter. Surtout pas d’affolement, le Corfu trail est accessible à absolument chacun (dixit une victime d’un vertige sévère). Nul n’est besoin d’un équipement sophistiqué, une bonne paire de chaussures de marche suffit, un chapeau de soleil, un poncho en cas de pluie, un répulsif anti-moustique pour les zones humides (ils sont impitoyables) et de l’eau sans oublier bien sûr de quoi grignoter, marcher creuse l’appétit et hors saison, les lieux de ravitaillement peuvent être très espacés.

Un petit mot au sujet des saisons d’ailleurs. En juillet et en août, il fait beaucoup trop chaud pour faire le Corfu trail, c’est une question de bon sens, quand la température flirte avec les 40°C, il n’est pas recommandé d’arpenter les chemins. Randonneurs, il faudra vous contenter de courtes balades à l’aube ou à la tombée du jour.
Le printemps est une période merveilleuse, car l’île n’est plus qu’un tapis de fleurs, et les températures sont encore douces. A partir de la mi-septembre, et jusqu’en novembre, on retrouve des températures clémentes mais les jours raccourcissent, et plus on avance dans le temps, plus les auberges et les tavernes ferment, il faut alors prévoir des étapes à la fin desquelles on puisse sauter dans un bus… ou faire du stop pour atteindre la ville de Corfou qui elle, reste ouverte au tourisme toute l’année.

Le Corfu trail est signalé par une flèche et les lettres CT sur un losange d’aluminium jaune. Il a été mis en place et balisé en 2001 par Hilary Paipeti, qui a également écrit plusieurs guides téléchargeables. Vous trouverez une carte au 1:65:000 plastifiée, disponible un peu partout à Kerkyra, qui indique clairement le Corfu trail d’une ligne noire. Vous pouvez également consulter le site Wikiloc qui donne des indications sur certains parcours mais pas sur l’intégralité du trail.
Beaucoup de personnes parcourent les 220 kilomètres en une dizaine de jours, mais rien ne vous empêche de prendre plus de temps pour savourer les paysages grandioses qui s’offrent à vous à chaque détour de chemin… quelle que soit votre décision, chacun de vos pas sera récompensé.
Sophie Mallard
Le baiser de Trump et Poutine – A Vilnius, en Lituanie, les propriétaires d’un restaurant ont créé la surprise en dévoilant, en mai dernier, leur nouvelle devanture : une oeuvre représentant Vladimir Poutine et Donald Trump en train de s’embrasser.
[Lire plus…]Randonnées dans les montagnes de Shar – Situées aux confins de l’Europe du Sud-Est, les montagnes de Shar s’étendent sur 76 km, du nord (au Kosovo) au sud (Macédoine), en passant à l’ouest par l’Albanie. Une expérience unique pour les amateurs de randonnées à la recherche de nouvelles sensations.
[Lire plus…]Ajvar – Si vous avez déjà passé l’automne dans les zones rurales des Balkans, vous savez sans doute que c’est non seulement la saison du ramassage des poivrons rouges, mais également celle de la confection de l’ajvar. Hajde revient aujourd’hui sur cette recette venue tout droit des Balkans.
[Lire plus…]Le Bektachisme est un ordre religieux ésotérique soufi connu dans le monde entier, partons à sa découverte en Albanie…
« Pour les humains qui ont la conscience, un indice est convenable.
Hadji Bektach Veli
Pour les gens inattentifs, la connaissance même est insuffisante. »

Photo Enris Qinami
Le soufisme lui-même est le cœur de l’Islam. Il est sa dimension spirituelle et la quintessence même de l’âme humaine.
La base de la doctrine mystique bektachie repose sur le fond (et non pas la forme) du noble Coran et les paroles attribuées au prophète Mahomet (sur lui la paix et la bénédiction).
Les bektachis croient en un Dieu unique, appelé Allah en islam, et ils prient seulement Dieu, le créateur des mondes, en lui reconnaissant tout ses attributs divins. En plus des cinq prières religieuses musulmanes, les Bektachis ont l’habitude d’accomplir deux prières spécifiques, une à l’aube et l’autre au crépuscule pour le bien être de l’humanité entière.
Les adeptes bektachis vénèrent le prophète Mahomet qui est le dernier messager de Dieu et le sceau de la prophétie.
Ils montrent un intérêt particulier pour l’Imam Alī, gendre et cousin du prophète de l’islam considéré comme « le roi des saints et le guide spirituel ».
Le fondateur de la voie bektachie est Hunkar Hadji Bektach Veli (1248 – 1341), de son vrai nom Muhammed Bektach. Au cours de sa vie, il a pris les titres hunkar, hadji et veli. Le mot hunkar signifie « celui qui crée le miracle », le mot hadji « celui qui accompli le pèlerinage à la Mecque » et le mot veli « celui qui porte la sagesse ».
Dans une des paroles de Dieu adressée directement au prophète et rapporté par lui, il est dit : « Ni les cieux, ni la terre ne peuvent me contenir, si ce n’est le cœur d’un amoureux sincère, d’un croyant pieux. » Le devoir du véritable croyant bektachi est donc d’aimer Dieu et de respecter toutes ses créatures.
Il est invité a respecter également tous les prophètes envoyés par Dieu ainsi que tous les livres saints, comme il est ordonné dans le Noble Coran Sourate 2 verset 136 – Dites : « Nous croyons en Dieu, à ce qui nous a été révélé, à ce qui a été révélé à Abraham, Ismaël, Isaac, Jacob et aux Tribus ; à ce qui a été donné à Moïse et à Jésus ; à ce qui a été révélé aux prophètes par leur Seigneur, sans établir entre eux aucune différence. Et c’est à Dieu que nous sommes entièrement soumis. »
Le cheminant bektachi est invité a cheminer vers la sagesse pour augmenter ses connaissances et comprendre l’Univers. Par ailleurs, Dieu est en tout dans l’Univers, y compris en l’Homme. L’amour du genre humain est l’essence du bektachisme qui croit en la manifestation du Créateur en l’Homme.
L’amour de Dieu est l’objectif ultime du cheminant bektachi et ceci fait de l’amour le degré le plus élevé de la foi. L’amour siège dans le cœur de l’Homme et le battement du cœur est le véritable pèlerinage autour de la maison divine, la véritable Kaaba.
« La religion est dans le cœur, elle n’est écrite nul part », disait le célèbre poète bektachi albanais Naim Frashëri.
« Celui qui se connaît soi-même connaît son Seigneur », dit une parole de Dieu adressée directement au prophète et rapporté par lui. Celui qui se connait soi-même dans la « vérité » de « l’Essence » éternelle et infinie, celui-là connait et possède toutes choses en soi-même et par soi même, car il est parvenu à l’état inconditionné qui ne laisse hors de soi aucune possibilité. Cet état est le but ultime de toute initiation.
« Quiconque a atteint la sagesse, c’est grâce à l’humilité.
Yunus Emre, poète turc de la mystique soufie bektachie.
Personne ne connaît la Vérité qui enveloppe l’univers.
Cherche-la en toi-même, elle n’est pas hors de toi.
Le chemin de la sagesse est ténu au possible. »
Article écrit par Enris Qinami

Le Jardin du Destin – Le Monument de la Liberté est un passage incontournable pour chaque touriste à Riga. Trônant à l’écart de la vieille ville, ce monument laisse une forte impression de par sa hauteur et également son ancrage au milieu d’une grande place vide qui renforce son importance.
Construite dans les années 1920, cette oeuvre fut pensée pour célébrer la mémoire de ceux s’étant battus pendant la guerre d’indépendance lettonne. Et elle fut financée par donations du peuple letton, nouvellement indépendant.
La génération actuelle a décidé d’avoir elle aussi son monument pour célébrer la Lettonie : Liktendarzs (le Jardin du Destin).
Le rapport des Lettons à la nature
Ne cherchez pas sur vos plans de Riga en cas de visite prochaine. Ce Jardin n’est pas situé dans la capitale. Il est même franchement à l’écart à une centaine de kilomètres de Riga. Près de Koknese, le projet a débuté depuis plus de 10 ans. L’idée ? Pouvoir construire un nouveau monument pour célébrer la Lettonie avec en ligne de mire 2018 et l’anniversaire des 100 ans de la déclaration d’indépendance du pays.
Alors pourquoi un mémorial aussi éloigné de la capitale ? La question peut certainement se poser. Mais il faut sans doute voir dans ce choix une dimension importante de l’âme de la Lettonie et des Lettons : le rapport à la nature. En effet, depuis des temps très anciens qui remontent aux Livoniens et au-delà, les Lettons et leurs ancêtres ont toujours cultivé une affection particulière pour la nature voire une certaine adoration par rapport aux choses naturelles.
Certaines divinités lettones étaient ainsi dédiées aux récoltes comme Jumis, ou au tonnerre, à la pluie, au ciel comme Perkons. Ce rapport très fort à la nature se retrouve aujourd’hui encore dans la manière d’appréhender le quotidien chez les Lettons et surtout dans les très importantes célébrations qui jalonnent l’année en Lettonie, à commencer par la fête du solstice d’été nommée Jani/Ligo.

Un architecte japonais, des dons des Lettons
Le Jardin est ainsi aujourd’hui construit sur une presqu’île, donnant sur la Daugava, le grand fleuve du pays. Sur plusieurs hectares, les fleurs, arbres et pierres des quatre coins du pays sont harmonieusement répartis pour offrir une promenade en toute quiétude aux passants, selon le dessin du très réputé artiste paysager Shunmyo Masuno.

Tous ces composants naturels du jardin sont eux financés par dons de particuliers. Ainsi, en se promenant, on retrouve sur un arbuste le nom d’une classe, d’un couple, d’une famille, parfois d’une personne décédée. Toutes les régions sont représentées alors que les appels aux dons ont fait et font encore l’objet d’une vaste campagne de communication sur divers médias.
Les Lettons du XXIe siècle veulent ainsi apporter le témoignage du respect ressenti pour leur pays et construire un Jardin que tous les Lettons pourront partager et dont ils pourront être fiers. Un endroit qui rappelle aussi avant tout que la nature est un élément indissociable de l’âme lettonne.
Un point au centre de la Bulgarie. Buzludzha. Une région austère, montagneuse. Et au milieu, posé dans cet univers quasiment vierge un monument. Un monument qui fête ses 35 ans cette année, dans un état de délabrement qui pourrait lui être bientôt fatal. Découverte d’un édifice historique avec deux guides de choix, Maria et Romain.

Buzludzha, une vision irréelle dans un environnement majestueux
Tous les deux ont été vite subjugués par le monument quand ils l’ont découvert. La Bulgare Maria avoue ainsi que la vision de ce monument lui a semblé « irréelle. Certaines personnes évoquent une soucoupe volante quand ils voient ce monument. En tout cas, c’est un endroit qui force le respect. » Pour le photographe français Romain Veillon, l’aspect colossal de l’ensemble a aussi marqué : « Même si j’avais déjà vu de nombreuses photos du lieu, on est vraiment saisi par la grandeur de l’endroit et l’impression de calme qui y règne.
Je m’y suis rendu seul, ce qui a renforcé ce sentiment. La petite marche qui y mène en suivant un chemin de pierre nous fait découvrir peu à peu Buzludzha qui finit par nous écraser complètement par son envergure. On a une vue sur toute la vallée à partir de là. On se sent assez privilégié de pouvoir explorer ce qui reste comme un pan de l’histoire de Bulgarie et un des vestiges les plus imposants du régime soviétique. »

Buzludzha, la mémoire d’une période volontairement mise aux oubliettes
Faut-il le rappeler, la Bulgarie fit en effet partie du grand bloc de l’Est sous influence communiste après la Seconde Guerre Mondiale. Ce monument de Buzludzha est directement lié à cette période historique comme le rappelle Maria : « Buzludzha a été construit en 1981 pour honorer la création du Parti Social Démocratique bulgare au même endroit en 1891. Buzludzha a été un sanctuaire pour les communistes bulgares. »
Cependant, après la chute du communisme à la fin des années 1980, ce monument comme nombre d’édifices liés au régime des cinquante années précédentes a été laissé à l’abandon. Pour Maria, la raison est claire : « Le communisme est un sujet tabou en Bulgarie. Aujourd’hui, les jeunes gens comme moi ne savent que peu de choses sur la période communiste en Bulgarie. Buzludzha fut important jusqu’en 1989. Après le monument a été laissé à l’abandon et détérioré notamment par les personnes qui étaient contre le régime communiste. Aujourd’hui, ce monument n’est pas préservé et reste théoriquement fermé au public. »
Buzludzha, un monument laissé à l’abandon, pour la joie des curieux

Théoriquement en effet. Mais seulement en théorie car ce monument est devenu avec le temps un endroit prisé, que ce soit par les nostalgiques du communisme ou par les amateurs de monuments désuets. Romain Veillon serait plutôt de cette seconde catégorie. Il voyage ainsi de part le monde pour photographier des monuments ou endroits figés dans le temps.
Le voyage à Buzludzha entra parfaitement dans sa démarche artistique : « Ma fascination pour les endroits abandonnés remonte à l’enfance. Comme beaucoup de gens j’imagine, la découverte de la maison en ruine du bout de la rue est un souvenir que l’on a chacun au fond de nous. Lorsque je découvre un lieu de ce type, mon premier réflexe est d’essayer d’imaginer quelles histoires se cachent derrière les vestiges qui restent, comment le lieu vivait et les raisons qui ont amené l’endroit à être déserté par l’être humain.
L’esthétique que je ressens est très importante et retranscrire cette impression est ce que j’essaie de faire de mon mieux. Ces endroits sont comme des voyages dans le temps où l’on peut se promener et avoir sous les yeux des bribes de vies passées. Buzludzha est un bâtiment assez connu qui bénéficie de nombreuses publications, il n’a pas donc pas été très difficile d’en entendre parler et de le situer. Ensuite, il s’agit juste d’organiser un voyage en Bulgarie et de bien choisir la période à laquelle y aller. Car les hivers peuvent être très rudes là-bas et c’est un endroit isolé en haut d’une montagne qui n’est pas toujours accessible. »
Buzludzha, une oeuvre d’art à explorer
Malgré tout, ceux qui le veulent réellement trouvent toujours un moyen d’arriver à destination. Surtout quand la destination vaut réellement le détour. Maria n’hésite ainsi pas un instant à qualifier Buzludzha « d’œuvre d’art gigantesque. Le monument fait 42 mètres de long sur 14,5 mètres de haut. Vous ne pouvez qu’être inspiré par cette vision. Le monument abandonné de Buzludzha est une œuvre d’art et le restera toujours. »

Loin d’être seulement un bâtiment brut, Buzludzha fut ainsi orné de nombreuses mosaïques et peintures que Romain a longuement pris le temps de découvrir : « Une fois à l’intérieur, l’immensité de la pièce et la beauté des mosaïques sont les premières choses qui m’ont marqué. Se retrouver au centre de cette pièce sous le marteau et la faucille communiste est une expérience inoubliable. Il est important de bien connaitre l’histoire de Buzludzha pour bien apprécier ce moment d’ailleurs.
J’ai aussi passé des heures à regarder et photographier chaque petite parcelle où il y avait de la mosaïque et j’étais stupéfait par la qualité de celles-ci. Enfin, il reste quelques traces de la période où Buzludzha était encore en activité quand on fouille bien le lieu, ce qui nous permet avec les images d’époque de reconstituer comment le lieu était il y a des dizaines d’années. »
Buzludzha, un monument unique au monde mais en péril
Laissé à l’abandon depuis la chute du communisme, Buzludzha se dégrade de plus en plus chaque année, à la fois naturellement mais aussi du fait de certains vandales venant saccager peu à peu l’extérieur mais aussi l’intérieur de ce monument. Pour Maria, le destin funeste de Buzludzha est triste mais compréhensible du fait « de l’histoire liée au communisme mais aussi des coûts très élevés liés à la maintenance d’un tel édifice. »

Pour Romain Veillon, voir se détériorer un monument de cette originalité historique est un réel crève-cœur : « Tout est unique à Buzludzha, que ce soit son histoire, son architecture ou son emplacement. C’est une combinaison de tout ça ; même si sa place dans les livres d’histoires est indéniablement ce qui frappe le plus avant d’y aller, une fois qu’on est à l’intérieur de ce que beaucoup surnomment ‘la navette spatiale’, on réalise un vrai bon dans le passé.
On passe quelques minutes à s’imaginer à l’époque où tous les dirigeants communistes du pays se trouvaient réunis dans cette salle ou qu’ils contemplaient le paysage à partir de ces immenses fenêtres donnant sur la montagne. Il est rare de pouvoir encore trouver des endroits réunissant ces trois qualités de nos jours où tout est trop souvent vandalisé ou détruit.
D’ailleurs, les graffiti commencent à recouvrir les mosaïques de Buzludzha, ce qui me rend vraiment triste. Malgré cela, je sais que je m’y rendrai encore car rarement un endroit m’a procuré autant de plaisir à photographier et où j’ai pu me promener pendant des heures sans m’ennuyer en continuant à m’ébahir devant tellement de petits détails. »
Alors vous savez maintenant ce qu’il vous reste à faire si vous voulez découvrir un monument unique qui permet de découvrir un pan de l’histoire de la Bulgarie et de l’Europe de l’Est. Une œuvre d’art dans un écrin naturel inoubliable.
Toutes les photographies sont de Romain Veillon. Vous pouvez retrouver son travail sur son site Internet mais également acheter son livre Ask the Dust qui regroupe ses clichés de lieux figés dans le temps aux quatre coins du monde.
Maria est une bloggeuse voyage primée, se balandant en Europe à la recherche d’histoires et de lieux d’exceptions.
Manele – Si vous êtes friands de Rap/R’n’B venu du sud de la France, vous connaissez forcément l’Algérino. Ce rappeur marseillais fut l’auteur l’année dernière de la chanson « Marrakech – Saint Tropez » en compagnie de Florin Salam. Mais avant d’être ce tube en France, « Saint Tropez » était une chanson de Florin Salam, le plus grand chanteur actuel de Manele. Dans cet article, nous allons essayer de vous faire découvrir cette musique se passant de l’aval des élites et qui a su subsister depuis des décennies en marge de l’industrie musicale classique roumaine. Découverte.
Manele ?
Selon la définition officielle du « Dictionnaire explicatif de la langue roumaine », une Manea (singulier de Manele) est une chanson d’amour d’origine orientale à la mélodie douce et retardée. Ce genre musical prenant racine au XIXème siècle s’est enrichi des influences ottomanes encore existantes dans le sud-est de la Roumanie. Il est aujourd’hui encore très difficile de dater et de situer précisément l’apparition des Manele.

En cause, la difficulté de trouver des sources ou encore la fiabilité douteuse de ces dernières. La communauté rom tend à expliquer que celle-ci est apparue dans les quartiers pauvres de Bucarest, notamment la quartier de Ferentari. Dans la réalité, il semble que les Manele soient bien plus anciennes, remontant donc bien au XIXème siècle. Toutefois, le musicologue roumain Costin Moisil tend à relativiser cette vision, considérant cette période du XIXème siècle comme celle d’une influence majeure de la musique orientale dans le paysage roumain, et non pas celle du développement de véritables Manele.
Il est aujourd’hui impossible de savoir à quoi pouvaient ressembler les premières Manele, du fait de l’absence d’enregistrement et de traces écrites à l’époque. On pense que ces chansons populaires ont ensuite été appropriées par les grands propriétaires fonciers, permettant leur diffusion. Jusqu’à la fin du XIXème siècle, les Manele furent oubliées à l’exception notable de la chanson « Până când nu te iubeam », chanson de 1853 reprise par Anton Pann et Victor Predescu en 1950 que certains considèrent comme une véritable Manea.
Les Manele modernes
Le terme de Manele s’est forgé autour des années 1950-1960 au sein des communautés roms de Roumanie, en réponse à la musique très sophistiquée au violon en vogue à l’époque dans le pays. Il s’agit d’une musique assez simple, aux paroles très accessibles et relatant souvent des histoires d’amour ou la vie idyllique telle que la communauté rom se la représente.
Aujourd’hui, il n’y a pas d’explication claire de la corrélation entre cette nouvelle musique rom et la reprise de ces anciens thèmes orientaux bien antérieurs. Toutefois, on considère une volonté de la part de cette communauté de se rattacher à une culture extérieure à la Roumanie ayant été bien présente dans celle-ci, tout comme la leur.
L’arrivée du modèle soviétique popularisa ce genre musical; bien que les orchestres soient en majorité constitués de roms, leur développement permettait à la propagande soviétique d’essayer de promouvoir une musique typiquement roumaine et liant les communautés ensemble. L’aval du pouvoir en place pour cette musique Manele suffit à la discréditer et vit une sorte de sous-culture se créer, la musique dite « banat » qui s’inspirait du « turbo-folk » serbe. Toutefois, celle-ci fut rapidement interdite par les institutions roumaines qui la considérait comme « polluée » par cette ingérence musicale venue de Serbie.
Toutefois, les Manele d’aujourd’hui reprennent cette musique pop issue de la musique banat et offrent un rythme bien plus proche de ces sonorités pop qu’orientalisant comme auparavant.
Les paroles sont souvent assez pauvres, utilisant un langage stéréotypé. Les chanteurs sont souvent issus des classes les moins instruites de la société roumaine, ce qui amène souvent des fautes de langue dans les chansons (parfois banalisées, devenant des « cas tolérés » de licence de style) et des sujets assez peu diversifiés. Il y est souvent question de femmes, d’amour, d’argent et plus récemment de voitures et d’ennemis.
Étant un genre musical en mouvement sans règles particulières, il est très difficile de placer les limites du genre Manele. Basé à la fin du XXème siècle sur l’amour et les épreuves de la vie, un nouveau genre de Manele prend place depuis quelques années, à base de grosses voitures, femmes dénudées et obscénités dans le texte et dans les clips.
Adrian Minune, Florin Salam, Susanu, Nicolae Guța, Babi Minune, Denisa, Laura Vass… Il serait impossible de citer tous les artistes de Manele. Il est néanmoins courant de voir les noms de Manelist être des pseudonymes hyperbolisants, comme Sorin Copilul de Aur (Sorin le fils du Soleil) par exemple. Même Florin Salam, le plus grand chanteur actuel est un pseudonyme, s’appelant de son vrai nom Florin Stoian.
D’un point de vue vestimentaire, si les anciens manelists arboraient parfois des costumes traditionnels, l’opulence est de mise avec des vêtements souvent brodés d’or ou ostensiblement onéreux. Cela retrouve la volonté de présenter la réussite telle qu’elle est vue par la communauté rom en Roumanie.
Souvent négligée et moquée, la musique Manele trouve enfin son public. Aujourd’hui, les sondages estiment qu’entre 80 et 90% de la population roumaine écoute occasionnellement des Manele. Plus que cela, 21,9% des 15-18 ans place les Manele comme leur genre musical favori.
Toutefois, il est encore honteux d’avouer en public que l’on aime les Manele si l’on est pas issu de la communauté rom ou dans les études supérieures. Néanmoins, nombreux sont ceux qui apprécient les Manele sans jamais l’avouer devant quiconque. Petit à petit, le genre tend à se démocratiser. Cela s’explique par la diffusion de certaines Manele sur les ondes nationales de la radio et le lancement en février 2005 par Silviu Prigoană de la première chaîne de télévision entièrement dédiée aux Manele, Taraf TV.
Toutefois, l’intelligentsia roumaine mène un combat fort et disproportionné face à ce genre musical. Des études très controversées ont voulu montrer que les auditeurs de Manele avaient un cerveau moins développé que les autres, de nombreux maires ont interdit la diffusion de Manele lors de fêtes publiques, dans les moyens de transports… C’est une des formes que prend le racisme anti-rom, jouant sur les stéréotypes.
N’en déplaise aux gens de la haute société, les Manele sont toujours là et s’ancrent aujourd’hui comme de fervents représentants de la communauté rom en Roumanie et au delà de ses frontières.
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