En 2017, le célèbre programme Erasmus+ célèbrait ses 30 ans. 30 ans d’échanges universitaires, de voyages, de découvertes, de rencontres et de fêtes. 30 ans de liens entre Etats et peuples européens. Tout au long de ces années, certains pays se sont affichés en tant que « leaders » d’Erasmus+ : l’Espagne, l’Allemagne ou encore la France.
Les pays d’Europe de l’Est, comme la Pologne, la Hongrie ou les pays baltes, sont pourtant bien implantés dans le programme et attirent de plus en plus d’étudiants internationaux. Et s’ils venaient à devancer les pays phares d’Erasmus+ ? Quels avantages ont les étudiants européens à choisir d’effectuer un échange dans ces pays et qu’apporte Erasmus+ aux pays d’accueil ? Petit tour d’horizon.
Erasmus+ en chiffres
Erasmus a été crée en 1987. Aujourd’hui, Erasmus+ comprend un ensemble de programmes financés par la Commission Européenne en faveur de l’éducation, de la formation et de la jeunesse : Erasmus pour les étudiants, Leonardo pour les apprentis, Comenius pour les lycéens, Grundtvig pour les adultes. D’autres programmes existent aussi, dont « Jeunesse en action », Erasmus Mundus qui encourage la mobilité des personnes et la coopération entre établissements européens et non européens, ou encore Tempus, Alfa, Edulink, et un programme de coopération avec les pays industrialisés.
En bref, Erasmus+, c’est beaucoup de choses dont plus de deux millions de participants depuis sa création, plus de 50 000 projets et environ 175 000 organisations. Et le budget correspond à l’ampleur du projet. En effet, entre 2014 et 2020, ce sont plus de 16 milliards d’Euros qui y sont consacrés. Enfin, Erasmus+ joue un rôle crucial sur l’emploi, ainsi ses participants affichent un taux de chômage inférieur de 23% à leurs pairs.
La place des pays de l’Est dans le programme
L’Espagne devance largement ses voisins européens en accueil d’étudiants : entre 2014 et 2015, 42 537 étudiants ont choisi d’effectuer leur mobilité dans le cadre d’Erasmus+ en Espagne. Suivent ensuite l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France.
A l’inverse, la France est le pays d’où partent le plus d’étudiants, suivie de l’Allemagne et de l’Espagne. Ainsi, on retrouve globalement les mêmes pays en tête du programme Erasmus+, qu’il s’agisse d’accueil d’étudiants ou de départ.
Les pays d’Europe de l’Est ont encore du chemin à faire pour dépasser l’Espagne ou même la France. Cependant, la participation d’étudiants européens au programme y est en nette augmentation. La plus présente est la Pologne, qui se détache de ses voisins avec l’accueil d’environ 11 000 étudiants étrangers dans le cadre d’Erasmus+ pour la période 2014-2015.
La Pologne est aussi le cinquième pays qui a envoyé le plus d’étudiants à l’étranger en 2012-2013, et le premier pays qui a envoyé le plus de personnel à l’étranger pour cette même période et compte parmi les dix destinations les plus prisées pour cette année scolaire. De petits pays, comme la Lituanie et la Lettonie, sortent du lot car ils présentent entre 2012 et 2013 une proportion plus élevée d’étudiants Erasmus+ par rapport au nombre total d’étudiants.
Si les pays d’Europe de l’Est sont loin d’accueillir ou d’envoyer à l’étranger autant d’étudiants que les pays d’Europe de l’Ouest, c’est chez eux que l’évolution des chiffres est la plus flagrante. Entre 2012 et 2013, la Lettonie a vu son taux de croissance de mobilité sortante augmenter de 81%, 72% pour la Grèce ou encore 71% pour la Bulgarie. La Turquie, qui participe aussi au programme Erasmus+, est le pays au taux de croissance de mobilité sortante le plus élevé avec 102%. (Voir carte ci-dessus)
La Pologne, leader des pays d’Europe centrale dans le programme Erasmus+
La Pologne se détache des autres pays d’Europe de l’Est au coeur du programme Erasmus+. Les chiffres sont clairs, il suffit de comparer les étudiants internationaux présents en 2012-2013 en Pologne avec ceux présents en Slovaquie, par exemple, pour comprendre le poids du pays. Ainsi, alors que la Slovaquie recevait 4 318 étudiants internationaux via Erasmus+, la Pologne en recevait 10 772. Pour la même année universitaire, 1 920 étudiants ont étudié en Bulgarie et 2 149 en Croatie. (Source : Commission européenne, statistiques sur le programme Erasmus pour l’année 2012-2013).
La Pologne est donc un pays important dans le programme d’échange Erasmus+, plus important que ses pays voisins. Le pays a pourtant mis un moment avant de décoller, et son envol s’est fait en une poignée d’années : en moins de quinze ans, le nombre d’étudiants français étudiant en Pologne dans le cadre d’Erasmus+ a été multiplié par 20 (d’après Le petit journal de Varsovie) et en cinq ans, le nombre d’étudiants internationaux venus effectuer un semestre en Pologne a doublé.
Pourquoi un tel boom ? On peut expliquer cet engouement pour la Pologne par le succès du programme « Ready, Study, Go, Poland » lancé par le ministère polonais de la Recherche et de l’Enseignement supérieur en 2012. Son but était alors d’attirer plus d’étudiants étrangers et de permettre des partenariats entre établissements d’enseignement supérieur polonais et internationaux.
Aujourd’hui, 17 pays et plus de 60 universités ont pris part au programme et les résultats se sont rapidement fait voir. Ainsi, entre 2010-2011 et 2011-2012, le nombre d’étudiants internationaux venus étudier en Pologne a augmenté d’environ 18%. La même année, plus de 18 000 étudiants polonais ont pu participer au programme Erasmus+, soit 3% de plus que l’année précédente. (Source : Le Courrier de Pologne)
Erasmus+ a un tel succès en Pologne qu’une émission de radio lui est dédié : Erasmus Evening, diffusée sur la station de radio de l’Université Mickiewicz de Poznań. Cette émission propose chaque soir à des étudiants polonais ayant étudié à l’étranger, ainsi qu’à des étudiants étrangers en Pologne de donner leur avis sur divers sujets tels que les différences entre les universités et les opportunités qu’elles créent, les systèmes d’éducation ou encore la vie de tous les jours des étudiants.
En créant de tels échanges et en donnant la parole à des étudiants de toutes nationalités et de tous horizons, Erasmus Evening met la lumière sur le programme Erasmus+ et tous les enjeux qui l’entoure, qu’ils soient culturels, sociaux et même économiques. L’émission a été crée par Gabriela Jelonek, gagnante du Charlemagne Youth Prize, prix remis par le Parlement européen chaque année depuis 2008 à des jeunes gens de toute l’Union européenne, pour des projets montrant une participation active au développement de l’Europe.
Exemple d’un pays grandissant dans le programme : la Slovénie
Avec des taux de mobilité et d’accueil croissants, les pays d’Europe occidentale, centrale et même des Balkans se veulent de plus en plus accueillants pour attirer encore plus d’étudiants internationaux.
C’est le cas de la Slovénie. D’après le Centre pour la Mobilité, l’Education Européenne et les Programmes d’Apprentissage (CMEPIUS), la Slovénie envoie plus de 2 000 étudiants étudier à l’étranger dans le cadre du programme Erasmus+ chaque année, et environ le même nombre d’étudiants internationaux viennent étudier en Slovénie, toujours dans le cadre d’Erasmus+.
Au cours des dix dernières années, les étudiants slovènes ayant participé au programme Erasmus+ se sont majoritairement rendus en Espagne, en Allemagne, en République Tchèque, en Pologne et en Turquie, d’après le Service de Coopération internationale de l’Université de Ljubljana. On note ainsi que si la Slovénie a une participation grandissante dans le programme Erasmus+, ses étudiants se rendent majoritairement dans les plus « gros » pays du programme. Il est intéressant de voir qu’à l’inverse, les étudiants étrangers accueillis à travers le programme sont principalement originaires des pays de l’ex-Yougoslavie : Croatie, Bosnie Herzégovine et Macédoine.
Et si la Slovénie se veut de plus en plus accueillante pour les étudiants internationaux – et compte envoyer d’avantage de ses étudiants à l’étranger – c’est en grande partie dû à l’impact positif d’Erasmus+. S’il n’y a pas de données exactes quant à son impact économique en Slovénie, la majorité des étudiants slovènes ayant participé au programme estiment que l’expérience est un réel tremplin qui leur a permis de s’émanciper et de gagner en confiance.
Une étude sur l’impact d’Erasmus réalisée en 2014 montre que les étudiants ayant participé à un échange universitaire international sont plus enclins à trouver rapidement un emploi après leurs études. Ainsi, la part des employeurs qui considèrent qu’une expérience à l’étranger est importante pour la future carrière professionnelle a presque doublé entre 2006 et 2013, passant de 37% à 64%. Preuve que le programme Erasmus+ n’a pas seulement un impact sur ceux qui y participent, mais bien sur l’entière population du pays.
Petits pays, pays de l’Est : comment attirent-ils les étudiants internationaux ?
Quand les « gros » pays d’Erasmus mettent en avant les universités prestigieuses et les mégapoles pour attirer les étudiants internationaux, comment les « petits » pays européens font-ils pour attirer à leur tour les étudiants d’Erasmus+ ?
Pour Milan Zver, député slovène au Parlement européen, la Slovénie dispose de nombreuses qualités pour garantir une expérience Erasmus+ exceptionnelle. Entre les paysages féériques et les villes à tailles humaines dont Maribor, une des raisons principales qui font de la Slovénie un pays attractif est le coût de la vie très faible. Pour un étudiant originaire d’Europe occidentale, vivre, sortir et voyager en Slovénie est très abordable. Un avantage indéniable pour tout étudiant en recherche de découvertes, d’aventures et – cliché du programme Erasmus mais bel et bien vrai – de nombreuses sorties.
Imaginez-vous vivre en colocation près de votre université d’accueil pour 100€ par semestre, sortir tous les soirs pour déguster des bières locales à 1€ la pinte, pouvoir visiter les musées de la ville (la plupart du temps) gratuitement et aller passer le week-end à Riga en payant 4€ votre aller-retour, ou bien à Varsovie pour 20€. Imaginez surtout que votre semestre à l’université est entièrement gratuit et que vous pouvez bénéficier, en plus de tout cela, d’une bourse Erasmus pour vous aider à financer vos études. Vous avez là un échange à Vilnius, en Lituanie, via le programme Erasmus+.
Evidemment, la position géographique, la culture et l’histoire unique des pays d’Europe orientale, centrale et des Balkans sont des atouts considérables pour effectuer un échange Erasmus+ et il faudrait beaucoup plus qu’un article pour expliquer en quoi chaque pays est intéressant.
Combinez le tout : coût de la vie très bas, paysages magnifiques, culture unique, histoire passionnante et possibilités de voyages infinis, et vous avez là les destinations parfaites pour étudiants internationaux. Les « petits » pays européens regorgent de qualités pour satisfaire les étudiants Erasmus+. Et s’ils venaient à dépasser les pays « classiques » du programme d’échanges universitaires ?
Un grand merci à Krystyna Łybacka et Milan Zver pour leur précieuse aide à l’écriture de cet article.
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.