En 2017, le pays a accueilli plus de 1,8 million de touristes, 80 % de plus qu’en 2007. Même si la pandémie a fait chuter ce chiffre, le tourisme contribue désormais à 11,6 % du PIB et 22% indirectement. Moins prisé que sa voisine, la Croatie, le Monténégro s’est tout de même fait un nom. Ce qui n’est pas sans danger pour ce petit territoire, dont le littoral s’étend sur à peine 300 kilomètres, soit huit fois moins que la Bretagne.
En 10 ans, le nombre de visiteurs a presque doublé au Monténégro, dont la superficie ne dépasse pas la moitié de la Bretagne. En 2017, avant la crise, le pays a dénombré 1,8 millions de touristes étrangers, notamment grâce à ces paysages à couper le souffle et à des tarifs attractifs.
Des chiffres toutefois bien moins élevés que ceux de la Croatie, sa voisine, qui a accueilli 20,6 millions de touristes en 2019. Selon Jovan Ristic, le président de l’Office du tourisme de Kotor, si « Dubrovnik et la Croatie attirent plus de touristes, c’est notamment parce que de nombreuses structures d’accueil ont été construites plus facilement de l’autre côté de la frontière, grâce à l’Union européenne (si le Monténégro utilise l’euro, il ne fait pas partie de l’UE, ndlr). »
Malgré cela, le tourisme est un secteur clé de l’économie monténégrine. Il contribue directement à 11,6 % du PIB et jusqu’à 22 % indirectement. Le pays accueille en majorité des Russes et des Serbes. Seulement 5 % des touristes proviennent des autres pays limitrophes, 4 % d’Allemagne, 3% de France et environ 2% d’Italie.
Une baisse de fréquentation de près de 50 %
Même si le secteur a connu « une forte chute d’activité » depuis 2020, selon les autorités monténégrines qui estiment que cette baisse était de 40 à 50 %, les chiffres repartent à la hausse cette année « mais la fréquentation n’est pas comparable à celle des années précédentes », estime Mario, serveur du restaurant Armonia, dans le village de Perast, au sein des gorges de Kotor.
D’ordinaire, « ça grouille de bateaux proposant des excursions et des croisières », estime Tijana Crorovic, étudiante en droit de 23 ans, qui passent, depuis qu’elle est née, tous ses étés au Monténégro.
Habituellement, d’imposants paquebots déversent chaque jour des milliers de touristes à Kotor, principale ville des gorges inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco, qui compte près de 23 000 habitants.
Alors, même s’il y a « de nombreux avantages à être une destination touristique », estime Bojana Petkovic, responsable du Département pour la protection de l’héritage naturel et culturel de la Ville de Kotor, ces flots de touristes perturbent largement la vie locale.
« Il y a des embouteillages importants, une plus grande quantité de déchets et une hausse des niveaux de bruits et de pollution de l’air, notamment dû aux bateaux de croisière », énumère-t-elle. D’autant que l’afflux touristique fait « exploser les prix », complète l’étudiante en droit.
Une côte quasi entièrement bétonnée
Et si Perast et Kotor, toutes deux protégées par l’Unesco, restent préservées, la côte adriatique montre un tout autre visage.
De Budva à Ulcinj, près de la frontière albanaise, le littoral a quasi été entièrement bétonnée. La grande majorité des plages sont privatisées et les infrastructures touristiques ont poussé anarchiquement comme des champignons. Seules quelques criques éparses ont échappé à la construction de complexes hôteliers ou ne sont accessibles que par la mer.
« Budva s’est métamorphosée, regrette l’étudiante serbe Tijana Crorovic. Elle n’a plus rien à voir avec la ville que j’ai connue lorsque j’étais enfant. C’est devenu le temple de la fête. Même des piscines ont été construites sur la plage. »
La raison ? « Le profit », estime-t-elle. Car « préserver les ressources naturelles ne rapporte rien. » Une transformation sur fond de corruption politique et d’emprise mafieuse, comme le détaillait récemment Le Monde.
Même constat, plus au sud. Près de Bar (en face de Bari, en Italie), Branka Boskov est propriétaire d’une maison en bord de mer depuis trente ans, à Dobra Voda. D’origine serbe, elle se souvient avec amertume de ses premières vacances sur le littoral monténégrin. « Il y a 30 ans, il n’y avait que des arbres entre la route et la mer. »
Aujourd’hui, les tilleuls et les oliviers ont laissé place à une flopée d’immeubles hauts de sept à huit étages et à des chantiers d’hôtels ouverts aux quatre vents.
Une baisse de 8,7 % du PIB en 2020
Damir Davidović, sécrétaire d’Etat au bureau du ministère du développement durable et du tourisme au Monténégro, assure que « les autorités ont pris la mesure du problème et analysent la situation pour trouver un juste équilibre. » De son côté, la Ville de Kotor, annonce également qu’elle souhaite « proposer une offre touristique plus durable en résolvant les problématiques liées au tourisme de masse. »
La pandémie ferait d’ailleurs émerger des filières alternatives, tournées vers l’éco-tourisme et la nature. Une filière que le pays souhaite développer, en attirant notamment des entreprises pionnières dans ce domaine.
Mais face aux conséquences de la crise sanitaire, pas simple d’initier des changements de pratique en devenant plus raisonnables. En faisant chuter la fréquentation touristique, la pandémie aurait en effet entraîné une baisse de 8,7 % du PIB dans le pays, en 2020, selon le Fonds monétaire international.
Le Monténégro cherche donc des solutions rapides pour sortir de la crise et mise pour cela sur les secteurs qu’il maîtrise le mieux : le tourisme et la construction.
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