Sarajevo est une ville inspirante à laquelle les membres de Zabranjeno Pušenje restent très attachés. Leur dernier album est l’occasion de revenir sur le parcours singulier de ce groupe emblématique des années 80, dont les méandres de l’histoire Yougoslave a fait basculer la carrière du groupe.
Sarajevo, terre nourricière pour Zabranjeno Pušenje
Pur produit du rock yougoslave, l’histoire de Zabranjeno Pušenje (Interdiction de fumer en serbo-croate) commence en 1980 dans le quartier de Koševo à Sarajevo.
Le groupe accède à la célébrité en 1984 avec la parution d’un premier album peu distribué, mais qui, grâce au bouche à oreille, va leur permettre de faire une grande tournée dans tout le pays. Ce disque fondateur, “Das Ist Walter” (nommé ainsi en hommage au film partisan “Walter défend Sarajevo” sorti en 1972) sera vite réédité et vendu à plus de 100 000 exemplaires.
Ils seront ensuite invités à la télévision où ils lancent une émission politique satirique qui fera beaucoup parler d’elle. Mais c’était sans compter sur le régime socialiste post Tito en place, qui finit temporairement par les interdire en radio et à la télévision en raison de leurs prises de position, allant même jusqu’à faire annuler certains concerts.
Des heures difficiles
Ils souffriront du boycott des médias lors de la sortie de leur deuxième album en 1985 (“Dok Čekaš Sabah sa Šejtanom“) avec pour conséquence directe une baisse des ventes, bien que celui-ci reçoive d’excellentes critiques de la part du public. Les premières divergences apparaissent alors et plusieurs membres quittent le groupe : c’est le moment où un certain Emir Kusturica, tout juste “palmé” à Cannes pour “Papa est en voyage d’affaire” arrive à la basse. Il y restera une année, ce qui lui permit de prendre un peu de distance avec la pression liée à son métier de réalisateur de renommée internationale.
La carrière de Zabranjeno Pušenje prendra une tournure inattendue lors de l’éclatement de la Yougoslavie au début des années 90, puisque les membres se retrouveront séparés dans différents pays. Une partie du groupe continuera de jouer sous le nom de Zabranjeno Pušenje et reprendra son activité après le siège de Sarajevo, tandis que d’autres membres comme le chanteur et fondateur, Nenad Janković, poursuivront leur carrière à Belgrade en montant un tout nouveau projet qui prendra par la suite le nom de The No Smoking Orchestra, le groupe qui accompagne désormais Emir Kusturica en tournée et pour ses musiques de films.
Šok I Nevjerica
Leur quinzième album Šok I Nevjerica continue de montrer ce qui a fait l’originalité et la réputation du groupe dans les années 80. Un rock influencé par des sonorités empreintes au folklore yougoslave et qui porte des textes très souvent revendicatifs avec un soupçon d’humour bien balkanique. A la seule nuance près que des sonorités plus folk ont fait leur apparition ça et là, rendant cet album un peu moins “brut” que ses prédécesseurs. A noter, la collaboration avec Sassja dans cet album pour le titre Kupi nas Ali !
Si cet album est très intéressant, je ne peux m’empêcher de recommander l’écoute de “Muzej Revolucije” (sorti en 2009, le jour même de la commémoration de la Révolution d’Octobre), plus brut et qui reste pour moi ma meilleure référence quand j’écoute Zabranjeno Pušenje.
Un documentaire explorant l’histoire du groupe à travers les récits de trois de ses membres fondateurs : Sejo Sexon, Nele Karajlić et Fudo est sorti en 2016.
Šok I Nevjerica est disponible en téléchargement gratuit sur leur site, et en écoute sur Deezer.
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