Les amoureux du septième art avaient rendez vous cette semaine à Paris avec la première édition du festival Ciné Baltique, qui a mis à l’honneur durant quatre jours le cinéma contemporain estonien, letton et lituanien. Compte rendu.

Au coeur de Paris, Ciné Baltique a pris le pari de révéler au public le meilleur de la création cinématographique contemporaine au Cinéma l’Arlequin, rue de Rennes. Proposée conjointement par les Ambassades d’Estonie, de Lituanie et de Lettonie – et leurs partenaires nationaux – cette première édition a réunit pas moins de 19 courts et 6 long métrages entre films d’auteurs, documentaires mais aussi un classique restauré. La présence de nombreux comédiens, réalisateurs et producteurs a permis au public de plonger véritablement dans le processus de création des films projetés.


L’actualité des cinémas baltes avec Ciné Baltique
Le temps de 9 séances réparties sur 4 jours, Ciné Baltique a montré toute la vitalité du cinéma d’auteur estonien, letton et lituanien, à travers des projections plébiscitées par le public parisien. Projetés pour la première fois en France, dans des versions sous titrées, ces films parfois déjà primés dans leurs pays ont séduit les spectateurs par leur diversité.
Outre trois après midis consacrés aux courts-métrages, nous avons notamment pu découvrir, en première française, Drowning Dry du réalisateur lituanien Laurynas Bareiša. Un film qui nous a séduit par son arche narrative originale en puzzle, avec la présence de sa comédienne principale célèbre en son pays, Gelminė Glemžaitė. Drowning Dry a reçu deux prix au célèbre Locarno Film Festival, pour la meilleure réalisation ainsi que pour la meilleure interprétation pour le casting principal.


Autre première française, le très beau The Exalted, du letton Juris Kursietis, mettant en scène une célèbre organiste qui voit sa vie basculer lorsque son mari est accusé de corruption. Est ce vrai ou est ce monté de toutes pièces ? Que cache t-il ? Que sait-il réellement ? Son couple y survivra t-il ? Une fin ouverte qui laisse libre court à notre imagination, comme l’ont expliqué à l’issue de la projection le réalisateur & scénariste primé Juris Kursietis avec la comédienne principale Johanna Wokalek et la co scénariste Līga Celma-Kursiete.
Présenté récemment au Tallinn Black Nights Film Festival, Juris Kursietis y a remporté le prix du Meilleur Cinéaste Balte.

Prix du Meilleur documentaire en 2023 au prestigieux festival Sundance aux Etats – Unis, et Sélection Officielle du festival du Film des Arcs – entre autres – Smoke Sauna Sisterhood a fait figure d’événement en guise de clôture de cette première édition de Ciné Baltique. Multi primé depuis sa sortie en salles en 2023 dans plusieurs pays, ce documentaire nous plonge dans l’intimité des saunas à fumée traditionnels du sud de l’Estonie, inscrits au Patrimoine Mondial de l’Unesco.
C’est à travers les rituels ancestraux du sauna estonien et de ses croyances, qu’Anna Hints a capté – durant six années de tournage et deux de montage – les paroles de ces femmes sur leur vie et leurs blessures. C’est dans cette chaleur et ces pierres fumantes que ces femmes livrent sans pudeur des témoignages forts qui font écho à la condition féminine d’hier et d’aujourd’hui.
Juste avant, Anna Hints a proposé son dernier court métrage, « Sauna Day« , un pendant masculin à son long métrage, présenté lors de la Semaine de la Critique au Festival de Cannes en 2024.
Citons également le poignant « Toxic« , premier long métrage de la réalisatrice lituanienne Saulė Bliuvaitė, présenté en ouverture du festival, ainsi que « Lioness » (2024) de l’estonienne Liina Triškina-Vanhatalo (Prix du Meilleur scénario au Festival International du Film de Varsovie).















Un classique restauré
Seul film ancien de la programmation, « Quatre chemises blanches » a été tourné en 1967 par Rolands Kalniņš, puis restauré en 2017 grâce au programme Cannes Classics du Festival de Cannes. Interdit de diffusion à l’époque par la censure soviétique, il aura fallu attendre une vingtaine d’années pour qu’il commence à être diffusé en public dans une période marquée par le Dégel quelques années avant la chute de l’URSS. Son histoire est une sorte de mise en abîme de la création artistique du temps de la Lettonie dominée par l’Union Soviétique, avec ce poète contraint à devoir choisir entre renoncer à son art et accepter de modifier ses textes pour plaire à la commission de censure.
Un sujet forcément audacieux et risqué pour l’époque, inspiré par l’esthétique de la Nouvelle Vague, tchèque notamment puisque les films français n’étaient pas autorisés.
Ce film a été tourné dans les studios d’Etat, le Riga Film Studio, qui produisait 7 films par an financés par Moscou, comme nous l’a expliqué Dita Rietuma, directrice du National Film Centre de Lettonie. Un long métrage dont le scénario fait écho à l’histoire du réalisateur, déjà censuré pour son premier film avant de voir « Quatre chemises blanches » subir le même sort, puis de voir le tournage de son troisième film stoppé et ses bandes détruites.
Interdit à l’époque, « Quatre Chemises Blanches » est devenu aujourd’hui un classique du cinéma letton, et permet de découvrir la réalité de la création artistique dans les années 60 en Lettonie.


Avec le très beau succès public et artistique de cette première édition, nul doute que le Festival Ciné Baltique est en passe de s’inscrire comme un événement incontournable, pour offrir au public parisien – qu’il soit issu de la diaspora ou tout simplement curieux – un reflet de l’actualité cinématographique de ces trois pays en faisant venir jusqu’à nous de belles découvertes en avant première. Une très belle programmation marquée par une mise en avant de rôles féminins très forts.

Nous remercions chaleureusement Eike Eller, attachée culturelle de l’Ambassade d’Estonie, pour l’invitation, ainsi que l’équipe du festival pour son accueil !






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