Chaque année, je reçois une kyrielle de messages me souhaitant « Joyeux Noël » le 25 décembre. Chaque année, je réponds poliment : « Merci mais je fête Noël le 6 janvier et non le 25 décembre. » Chaque année, on me demande, stupéfait la raison de ce « décalage ». La raison est simple : je viens de la communauté arménienne. Mais alors… pourquoi le Noël arménien est-il fêté le 6 janvier ?
Noël arménien – Pour comprendre, il faut remonter quelques siècles plus tôt…
Les arméniens, pour la majorité, sont des chrétiens orthodoxes apostoliques car le christianisme leur a été importé en Arménie par les apôtres Simon, Thaddée et Barthélémy. C’est en 301 après J-C que l’Arménie adopte le christianisme comme religion d’Etat et devient ainsi le premier Etat chrétien au monde. Suite à l’affaiblissement de l’Empire romain, le Royaume d’Arménie se voit être séparé en deux royaumes de plus petite taille : la Persarménie, dominée par les Perses et l’Arménie occidentale, dominée par les byzantins.
Les arméniens refusent alors de se soumettre à la religion des Perses, pendant qu’à Rome on adopte la doctrine du concile de Chalcédoine, celle qui considère que le Christ est à la fois divin et humain. Cette doctrine a été rejetée par l’Eglise apostolique arménienne qui rompt alors définitivement ses liens avec l’Eglise de Rome. De ce fait, le 25 décembre correspondant au Noël catholique, il est donc logique que les arméniens ne célèbrent pas Noël ce jour-là car ils ne sont pas catholiques pour la plupart.
Noël arménien – Cela n’explique cependant pas pourquoi les arméniens célèbrent Noël le 6 janvier…
A l’origine, la naissance de Jésus était fêtée le 6 janvier, soit le jour de l’épiphanie. Mais le Pape, pour combattre les fêtes païennes, a fixé le jour de Noël le même jour que certaines fêtes païennes soit le jour du solstice d’hiver, à savoir le 21 décembre.
A cause d’une erreur de calcul (ce n’est pas une blague), le jour de Noël a été fixé le 25 décembre. Les arméniens ne reconnaissant pas l’autorité du Pape catholique car étant apostoliques et ayant leur propre chef spirituel, le « Catholicos », ils ont décidé de garder la date originelle de la naissance du Christ. Alors, qui est en « décalage » maintenant ?
Noël arménien – Mais comment les arméniens fêtent-ils Noël ?
Pour les arméniens vivant en Arménie, à Noël, toute la famille se déplace à l’Eglise puis se retrouve autour d’un bon repas. Rien de bien différent du Noël catholique me diriez-vous… Cependant, pour les arméniens de la diaspora, le 6 janvier n’étant pas un jour férié, la tâche se voit être plus compliquée. Certains ne fêtent donc pas Noël le 6 janvier mais bien le 25 décembre pour des questions de praticité.
Concernant le repas de Noël, aucun plat d’entrée ou de plat principal n’est typique de cette période de l’année. De plus, deux mondes s’affrontent : la cuisine arménienne de l’Arménie actuelle basée sur la grillade de poissons et de viandes (les brochettes appelées « khorovadz ») et la cuisine arménienne de la diaspora qui puise ses origines en Turquie, au Liban, en Syrie, en Grèce.
C’est ainsi que les mezzés comme les feuilles de vigne et légumes farcis (« dolma/տոլմա»), les feuilletés au fromage (« bereks/պըրեկ »), le taboulé, le « basteurma/բաստուրմա» (un type de saucisson) se retrouvent sur la table de Noël des arméniens d’occident et non d’orient.
Les plats sont toujours accompagnés de lavash (լավաշ), ce pain traditionnel arménien qui met les arméniens d’Arménie et de la diaspora d’accord. Le dessert de Noël, mangé à la fois en Arménie et dans la diaspora est sans aucun doute le « anouch abour/անուշ աբուր », une bouillie de blé et de fruits secs aromatisée à la cannelle et à l’eau de rose. Les autres desserts orientaux comme les baklavas, les kadayifs et les loukoums se mangent également à Noël, surtout chez les arméniens de la diaspora.
Շնորհավոր նոր տարի և Սուրբ Ծնունդ
Bonne Année et Joyeux Noël !
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